«El alma de la ciudad», la poesía de Émile Verhaeren traducida al castellano
Traduce y escribe | Pedro Alcarria
El antiguo sueño está muerto y el nuevo aún en la forja.
E.V.
A pesar de su importancia en el contexto de la literatura europea del fin de siècle, la obra de Émile Verhaeren (1855-1916), poeta belga de expresión francesa y uno de los principales representantes del modernismo, apenas ha sido traducida al español. Especialmente sorprendente era la inexistencia en nuestro idioma de una versión de Las ciudades tentaculares, título fundamental de su producción y que lo sitúa como uno de los primeros poetas en reflejar en sus versos el panorama de la modernidad industrial.
En 2022, gracias al apoyo de Ediciones Vitruvio, pude ofrecer al lector español la primera versión completa de Les Villes tentaculaires (1895), una obra concebida en versos libres de gran potencia imaginativa, que recuerdan en parte a los de un contemporáneo de Verhaeren: Walt Whitman.
Los poemas de Las ciudades tentaculares nos trasladan a los distintos escenarios de una ciudad, escenarios que parecen abordados por Verhaeren con interés taxonómico, como los órganos de un ente vivo, de una novedosa criatura surgida en los inicios de la imparable revolución industrial. Acompañados por la poesía de Verhaeren somos testigos de una vibrante descripción de las calles en efervescente construcción; de las masas acudiendo a los prostíbulos, a las iglesias y catedrales; entrando y saliendo de los teatros de variedades, de las fábricas y los bazares al ritmo desbocado de cualquier metrópolis europea de finales del XIX.
Verhaeren describe, con abigarrada precisión, el pavor y el espeluznante dinamismo de las ciudades europeas en los albores de la modernidad. Por ello, ha sido mi empeño como traductor el trasladar a un castellano melodioso y vivaz el francés torrencial del autor, lleno de imágenes en tensión, parecido a una pesadilla de luces y estruendos.
Como muestra, ofrezco aquí al lector de Aullido, el poema El Alma de la ciudad, una pieza representativa de la colección, que tiene toda ella algo de sinfonía, compuesta por los propios ritmos de la ciudad, el oleaje y el latido de su corazón palpitante, vertiginoso, febril… un corazón gigantesco bombeando desbocado toda la confusión y el caos de sus ritmos mecánicos, pero marcando también el compás y el pulso del futuro. Y es que Verharen nos plantea temas novedosos en el nacimiento del libro, pero que actualmente resultan absolutamente vigentes para todos nosotros: el colapso del medio ambiente; la miserable pobreza y alienación de las capas fabriles de la sociedad, el nuevo culto al Dios del consumismo; la pugna entre lo agrario y lo industrial…
En definitiva, con Las ciudades tentaculares, Émile Verhaeren nos propone una respuesta poética al malestar contemporáneo, a muchos de los interrogantes y anhelos que siguen marcando nuestra pertenencia a este mundo y a este tiempo incierto.
L'âme de la ville / El alma de la ciudad
.
.Les toits semblent perdus
Et les clochers et les pignons fondus,
Dans ces malins fuligineux et rouges,
Où, feu à feu, des signaux bougent.
Une courbe de viaduc énorme
Longe les quais mornes et uniformes;
Un train s’ébranle immense et las.
Là-bas,
Un steamer rauque avec un bruit de corne.
Et par les quais uniformes et mornes,
Et par les ponts et par les rues
Se bousculent, en leurs cohues,
Sur des écrans de brumes crues,
Des ombres et des ombres.
Un air de soufre et de naphte s’exhale,
Un soleil trouble et monstrueux s’étale;
L’esprit soudainement s’effare
Vers l’impossible et le bizarre;
Vivants ou morts, voit-il encor
Ce qui se meut en ces décors,
Où, devant lui, sur les places, s’exalte
Ailes grandes, dans le brouillard
Un aigle noir avec un étendard,
Entre ses serres de basalte.
Ô les siècles et les siècles sur cette ville,
Grande de son passé
Sans cesse ardent – et traversé,
Comme à cette heure, de fantômes !
Ô les siècles et les siècles sur elle,
Avec leur vie infatigable et criminelle
Battant —depuis quels temps?—
Chaque demeure et chaque pierre
De désirs fous et de colères carnassières !
Quelques huttes d’abord et quelques prêtres.
L’asile à tous, l’église et ses fenêtres
Laissant filtrer la lumière du dogme sûr
Et sa naïveté vers les cerveaux obscurs.
Donjons dentés, palais massifs, cloîtres barbares;
Croix des papes dont le monde s’effare;
Moines, abbés, barons, serfs et vilains;
Mitres d’orfroi, casques d’argent, vestes de lin;
Luttes d’instincts, loin des luttes de l’âme,
Entre voisins, pour l’orgueil vain d’une oriflamme;
Haines de sceptre à sceptre et monarques faillis
Sur leur fausse monnaie ouvrant leurs fleurs de lys,
Taillant le bloc de leur justice à coups de glaive
Et la dressant et l’imposant : grossière et brève.
Puis, l’ébauche, lente à naître, de la cité :
Forces qu’on veut dans le droit seul planter;
Ongles du peuple et mâchoires de rois;
Mufles crispés dans l’ombre et souterrains abois
Vers on ne sait quel idéal au fond des nues;
Tocsins brassant, le soir, des rages inconnues;
Flambeaux de délivrance et de salut, debout
Dans l’atmosphère énorme où la révolte bout;
Livres dont les pages, soudain intelligibles,
Brûlent de vérité, comme jadis les Bibles;
Hommes divins et clairs, tels des monuments d’or
D’où les évènements sortent armés et forts;
Vouloirs nets et nouveaux, consciences nouvelles
Et l’espoir fou, dans toutes les cervelles,
Malgré les échafauds, malgré les incendies
Et les têtes en sang au bout des poings brandies.
Elle a mille ans la ville,
La ville âpre et profonde
Et sans cesse, malgré l’assaut des jours,
Et les peuples minant son orgueil lourd,
Elle résiste à l’usure du monde.
Quel océan, ses cœurs ! quel orage, ses nerfs !
Quels nœuds de volontés serrés en son mystère !
Victorieuse, elle absorbe la terre;
Vaincue, elle est l’affre de l’univers :
Toujours, en son triomphe ou ses défaites,
Elle apparaît géante, et son cri sonne et son nom luit,
Et la clarté que fait sa face dans la nuit
Rayonne au loin, jusqu’aux planètes !
Ô les siècles et les siècles sur elle !
Son âme, en ces matins hagards,
Circule en chaque atome
De vapeur lourde et de voiles épars;
Son âme énorme et vague, ainsi que de grands dômes
Qui s’estompent dans le brouillard;
Son âme, errante, en chacune des ombres
Qui traversent ses quartiers sombres,
Avec une ardeur neuve au bout de leur pensée;
Son âme formidable et convulsée :
Son âme, où le passé ébauche
Avec le présent net l’avenir encor gauche.
Ô ce monde de fièvre et d’inlassable essor
Rué, à poumons lourds et haletants,
Vers on ne sait quels buts inquiétants ?
Monde soumis pourtant à des lois d’or,
À des lois douces, qu’il ignore encore
Mais qu’il faut, un jour, qu’on exhume,
Une à une, du fond des brumes.
Monde aujourd’hui têtu, tragique et blême
Qui met sa vie et son âme dans l’effort même
Qu’il projette, le jour, la nuit,
À chaque heure, vers l’infini.
Ô les siècles et les siècles sur cette ville !
Le rêve ancien est mort et le nouveau se forge.
Il est fumant dans la pensée et la sueur
Des bras, fiers de travail, des fronts, fiers de lueurs,
Et la ville l’entend monter du fond des gorges
De ceux qui le portent en eux
Et le veulent crier et sangloter aux cieux.
Et de partout on vient vers elle,
Les uns des bourgs et les autres des champs,
Depuis toujours, du fond des loins;
Et les routes éternelles sont les témoins
De ces marches, à travers temps,
Qui se rythment comme le sang
Et s’avivent, continuelles.
Le rêve ! il est plus haut que les fumées
Qu’elle renvoie envenimées
Autour d’elle, vers l’horizon;
Même dans la peur ou dans l’ennui,
Il est là-bas, qui domine, les nuits,
Pareil à ces buissons
D’étoiles d’or en des couronnes noires
Qui s’allument, le soir, évocatoires.
Et qu’importent les maux et les heures démentes,
Et les cuves de vice où la cité fermente,
Si quelque jour, du fond des brouillards et des voiles,
Surgit un nouveau Christ, en lumière sculpté,
Qui soulève vers lui l’humanité
De Las ciudades tentaculares (Ediciones Vitruvio, 2022)
.
.Los techos parecen perdidos
Los campanarios y los hastiales fundidos,
En esta enrojecida y fuliginosa mañana,
Donde, de fuego en fuego, se mueven las señales.
La curva enorme de un viaducto
Discurre por los uniformes y lúgubres muelles;
Se estremece un tren inmenso y cansado.
Allá, lejano,
Un ronco vapor con estruendo de bocina.
Y por los uniformes y lúgubres muelles,
Y por los puentes y las calles
Se empuja la muchedumbre,
Sobre pantallas de bruma cruda,
De sombras y de sombras.
Se exhala un aire de azufre y gasolina,
Un sol se extiende, turbio y monstruoso;
De pronto el espíritu, despavorido va
Hacia lo imposible y lo extraño;
Crimen o virtud, ve todavía
Aquello que se mueve en este decorado,
Donde ante él, en las plazas, se ensalza
Grandes alas en la niebla
Un águila negra con un estandarte,
Entre sus garras de basalto.
Oh siglo tras siglo sobre esta ciudad
Vasta de su pasado
Ardiendo sin cesar –y atravesada,
¡Como a esta misma hora, de fantasmas!
Oh siglo tras siglo sobre ella
Con su vida inmensa y criminal
Golpeando – ¿desde cuándo?–
Cada hogar y cada piedra
¡De locos anhelos y furia carnívora!
Unas cuantas chozas primero, unos cuantos curas.
Asilo de todos la iglesia y sus vidrieras
Dejando filtrar la luz del vero dogma
Y su candidez sobre los sesos oscuros.
Dentados torreones, macizos palacios, claustros bárbaros;
Cruz papal cuyo mundo se desvanece;
Monjes, abades, barones, siervos y villanos;
Mitras de oro bordado, yelmos de plata, trajes de lino;
Lejos de las luchas del alma, las luchas de los impulsos,
Entre paisanos, por el vano orgullo de un emblema;
Odios entre cetros y monarcas sin blanca
Abriendo la flor de lys sobre su falsa moneda,
Tallando el bloque de su justicia a golpes de espada
Y alzándola imperativa: grosera y breve.
Luego, el boceto, lento en nacer, de la ciudad:
Fuerzas que se quieren plantar sólo en el derecho,
Uñas del pueblo y fauces de los reyes;
Hocicos tensos en la sombra, acechando bajo tierra
Hacia quién sabe qué ideal en la profundidad de las nubes;
De noche, agitados tañidos, de ignoradas furias;
Antorchas de concesión y salud, erguidas
En la desmesurada atmósfera donde hierve la revuelta;
Libros cuyas páginas, súbitamente inteligibles,
Arden con la verdad, cual Biblias de antaño;
Hombres claros y celestiales, tal monumentos de oro
De donde surgen los hechos armados y fuertes
Nuevos y límpidos deseos, conciencias lozanas,
Y loca esperanza, en todos los sesos
A pesar de los andamios, a pesar de los incendios
Y de la sangrante cabeza tras los puños blandidos.
La ciudad tiene mil años,
Amarga y profunda ciudad;
Y sin cesar, a despecho del asedio de los días,
Y las gentes socavando su pesado orgullo,
Resiste a la usura del mundo.
¡Sus corazones, qué océano! ¡Sus tendones, qué tormenta!
¡Qué nudo de apretados deseos su misterio!
Victoriosa, sorbe la tierra;
Vencida, es el abismo del cosmos:
Por siempre, en su triunfo y en sus derrotas,
Emerge gigantesca, suena su grito y brilla su nombre,
Y la claridad que da su faz en la noche
¡Irradia a lo lejos, hacia los mundos!
¡Oh siglo tras siglo sobre ella!
Su alma, en esas mañanas desquiciadas,
Circula en cada átomo
De pesado vapor y velas dispersas,
Su alma enorme e imprecisa, igual que grandes domos
Que se desvanecen en la niebla.
Su alma errante en cada sombra
Que recorre sus barrios lóbregos,
Con un nuevo ardor al fondo de su mente,
Su alma formidable y convulsa,
Su alma, donde el pasado esboza
Con el nítido presente, el aún torpe futuro.
Oh este mundo de fiebre y de auge infatigable
Se apresura, jadeando con los pulmones cargados,
¿Hacia qué propósito ominoso?
Mundo sometido no obstante a leyes de oro,
A leyes evidentes, que aún ignora
Pero que un día hará falta exhumar,
Una a una del fondo de las brumas.
Un mundo obstinado, trágico y pálido hoy día
Que pone vida y alma en el mismo esfuerzo
Que proyecta, día y noche,
Cada momento, al infinito.
¡Oh siglo tras siglo sobre esta ciudad!
El antiguo sueño está muerto y el nuevo aún en la forja.
Está humeando de pensamientos, y del sudor de los brazos,
Orgullosos de su trabajo, de las frentes, orgullosas de su fulgor,
Y la ciudad lo escucha ascender desde el fondo de las gargantas
De aquellos que lo alojan en su ser
Y lo quieren gritar y sollozar a los cielos.
Y de todas partes le acuden,
Estos desde los pueblos, aquellos del campo,
Como siempre, desde los confines de la tierra;
Son testigos los caminos eternos
De estas marchas a través de los tiempos
Acompasadas como la sangre
Y cada vez más rebosantes.
¡El sueño! Es más alto que las humaredas
Que devuelve envenenadas
Rodeándola, hacia el horizonte;
Lo mismo en el miedo que en el tedio,
Allá abajo, es ella quien domina las noches,
Como esa maleza
De estrellas doradas y guirnaldas negras
Que se alumbran en la noche, evocadoras.
Y qué importan los males y las horas dementes,
Y los lagares del vicio donde la ciudad fermenta,
Si un día cualquiera, desde un fondo de velámenes y brumas,
Aparece un nuevo Cristo, tallado en luz,
Que eleva la humanidad hasta él
De Las ciudades tentaculares (Ediciones Vitruvio, 2022)